Assemblée Nationale : questions au gouvernement sur le rôle de l’Etat dans la gestion de la dette du système ferroviaire

17 février 2016 | Actualités du ferroviaire

Martial Saddier : Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, la loi du 4 août 2014 portant réforme du système ferroviaire reposait sur le postulat que l’intégration du gestionnaire d’infrastructure au sein d’un groupe public ferroviaire améliorerait l’efficacité industrielle et permettrait de réaliser 1,5 milliard d’euros d’économies par an.

 Le code des transports prévoit que l’État stratège et le groupe SNCF, composé de trois établissements publics industriels et commerciaux, doivent s’engager dans un contrat de performance d’une durée de dix ans. Plus d’un an et demi après la promulgation de la loi du 4 août 2014, nous nous étonnons de ne rien savoir de l’avancement ni de la teneur de ces contrats de performance, singulièrement de celui concernant le gestionnaire d’infrastructure, SNCF Réseau. La même loi dispose qu’un cadre social harmonisé doit être négocié et validé d’ici juin 2016. Or les négociations relatives à l’organisation et à l’aménagement du temps de travail n’ont pas vraiment débuté.

Où en est-on du décret-socle ?

 En diverses occasions, monsieur le secrétaire d’État, vous avez considéré que cette convention collective de branche serait un préalable à l’ouverture à la concurrence des services aux voyageurs. Comment le Gouvernement s’assure-t-il que la commission mixte paritaire en charge de cette négociation est à même de tenir ses objectifs ? En cas d’échec ou de retard, quelles dispositions envisagez-vous pour sortir de l’immobilisme actuel et permettre à toutes les entreprises ferroviaires de dégager les gains de productivité dont ce mode de transport a besoin ?

Votre gouvernement a mené une réforme territoriale visant à faire émerger des régions plus fortes, avec la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, et la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions. De nouveaux exécutifs viennent de prendre les commandes de ces régions au périmètre élargi et aux compétences accrues : ils devront déterminer les priorités de leur mandat, alors que la contrainte budgétaire se resserre.

Dans ces conditions, pourquoi ne pas leur reconnaître le droit de recourir à la concurrence régulée – ce qui est élémentaire pour toute autorité organisatrice de transports – afin de rechercher le meilleur rapport qualité-prix pour l’exploitation des services régionaux de TER ? Quelle est la position exacte du Gouvernement dans les négociations européennes qui ont lieu actuellement à Bruxelles sur ce sujet ?

 

Mme la présidente : La parole est à M. le secrétaire d’État.

 

Alain Vidaliessecrétaire d’État : La position du Gouvernement français sur ces questions est connue, elle est publique : vous ne pouvez l’ignorer. S’agissant du quatrième paquet ferroviaire, le Conseil des ministres de l’Union européenne est arrivé à une position commune. Le processus n’est pas terminé, car nous en sommes à la phase des trilogues, c’est-à-dire des négociations entre la Commission européenne, la présidence du Conseil de l’Union européenne, et le Parlement européen.

La France a soutenu cet accord à partir d’une position commune avec l’Allemagne – je tiens à le rappeler. Il prévoit, d’une part, une ouverture à la concurrence sur les lignes commerciales à partir du 1er janvier 2020, et d’autre part, la possibilité d’une ouverture sur les lignes régionales, celles que vous appelez « lignes TER », qui sont aujourd’hui couvertes par le monopole de l’opérateur historique, à partir de 2025.

 Cet accord maintient la possibilité d’une attribution directe : en d’autres termes, l’autorité organisatrice de transports pourra continuer à travailler directement avec l’opérateur historique. J’ai bien compris que ce n’est pas là votre position ; c’est en tout cas celle que défend le Gouvernement français, d’accord avec de nombreux autres pays comme l’Allemagne*, le Luxembourg ou les Pays-Bas.

Je ne sais pas quel sera le résultat final de la procédure de décision européenne, mais telle est notre position.

Vous m’avez interrogé sur le décret-socle : je ne sais pas si c’est une coïncidence, mais j’ai mis en ligne ce matin le projet de décret réalisé par le Gouvernement, ainsi que le calendrier du processus. Ces documents ont été envoyés aux organisations syndicales, ainsi qu’aux organisations patronales. D’ici au 15 mars une négociation aura lieu, après quoi le projet de décret sera transmis au Conseil d’État : cela se fait en toute transparence. 

De premiers commentaires ont été formulés. Les discussions seront, évidemment, complexes, puisqu’il s’agit de déterminer le rôle même de ce décret-socle. Pour ma part, je considère qu’il doit garantir des règles de sécurité pour l’ensemble des salariés, ce qui ne dispense pas les partenaires sociaux d’exercer leurs responsabilités. Je profite de votre question pour le dire : le décret-socle ne dispense pas les partenaires sociaux de négocier la convention collective.

Précisément, si le Gouvernement a décidé de publier le projet de décret-socle – sachant que ce décret devra de toutes façons, en vertu de la loi, entrer en vigueur le 1er juillet –, c’est pour éviter que les partenaires sociaux regardent ailleurs, pour éviter qu’ils s’en remettent totalement au Gouvernement en attendant la négociation. Notre position est claire : nous allons prendre le décret-socle, mais nous souhaitons que la négociation sociale ait lieu, et que la convention collective prévue par la loi soit conclue.

*A noter : Lors de la dernière rencontre à l’Assemblée nationale, le 21 octobre 2015, entre la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et la délégation de la commission des transports du Bundestag, l’Association Française du rail constate que les parlementaires allemands avaient reproché à la France sa lenteur dans l’ouverture à la concurrence des services conventionnés. « 2026 comme date butoir paraît trop  tardive », soulignait la de la commission des transports du Bundestag en rappelant qu’en Allemagne, Transdev « et Kéolis sont déjà très actives et bien acceptées ». L’Allemagne attend de la France une certaine réciprocité.

 

 

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